Nevers 1660-1790 Agriculture et commerce

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La ville de Nevers occupe sur la Loire, près des confins du Nivernais, du Bourbonnais et du Berry une situation avantageuse, mais dont les caractères ont évolué avec les siècles. A la fin de l'ancien régime les ressources agricoles du Nivernais sont généralement inférieures à ce qu'elles sont devenues aujourd'hui. Le sol formé d'une terre « froide » [1] est couvert de forêts plutôt que de cultures. Les vignobles des coteaux de Loire produisent des vins de qualité médiocre. Dans les prairies de Nièvre l'élevage du cheval et du gros bétail est encore maladroitement pratiqué. Mais les habitants font venir à bon compte des plaines du Bourbonnais et du Berry tous les produits qu'ils ne trouvent pas sur place.[not 1]

A défaut de richesse agricole, le Nivernais possède alors ce qu'il n'a pas toujours conservé depuis, des ressources industrielles considérables. Il est à cette époque par suite de l'immense étendue de ses forêts l'un des principaux centres français de l'exploitation des bois. Les terrains jurassiques, dont le sous-sol est presque partout constitué, renferment de riches gisements de minerai de fer, qui alimentent une foule de fourneaux et de forges. Aux XVIIème et XVIIIème siècles la province est un grand foyer métallurgique. De même certaines argiles et marnes tertiaires des environs de Nevers servent à la fabrication de la faïence, tandis que les sables siliceux de la Loire favorisent les industries du verre et des cristaux. La ville de Nevers, principal entrepôt de tous ces produits, est à proximité du bec d'Allier, une étape importante des voies de communication par terre et par eau les plus fréquentées du centre de la France.

Plusieurs courants commerciaux traversent le Nivernais, la navigation empruntant le cours des rivières et le charroi les vallées. Le plus actif de tous met en relation la ville de Lyon, les pays du Rhône et de la Méditerranée avec Paris. La grande voie du sud au nord, de la mer à l'océan, utilise à cette époque le cours de la Loire et le canal de Briare plus encore que les seuils bourguignons. Une foule d'objets nécessaires à l'approvisionnement de la capitale affluent sur Paris : vin et eaux-de-vie du Midi ou du Beaujolais, liqueurs des pays méditerranéens, huiles et savons de Provence, laines du Languedoc ou d'Espagne, soieries et tissus précieux de Lyon ou du Levant, charbon de pierre de Saint Etienne ou de Decize, bois et céréales d'Auvergne ou du Bourbonnais, pierre d'Apremont ou du Veuillin. Si Roanne est le lieu de transbordement des marchandises méridionales et Orléans le point de concentration au voisinage de Paris, Nevers est l'étape centrale. Ce trafic, très développé du sud au nord, est moins intense du nord au sud. Les articles fabriqués à Paris s'en vont à destination de l'Auvergne ou de Lyon. Un deuxième courant commercial part de Nantes.

Avec la découverte du Nouveau-Monde, ce port est devenu le plus important des ports français. Il accapare la plus grande partie des denrées coloniales et exotiques, sucres et épiceries. Il étend son action sur toutes les provinces centrales, sur tout le réseau de la Loire et de ses affluents. De Nantes arrivent aussi les poissons frais ou salés, ainsi que le sel de Bretagne ou du Poitou, qui navigue pour le compte de l'Etat. Les convois ramassent en chemin les ardoises d'Angers, les vins de Touraine et d'Anjou, les vinaigres et la bonneterie d'Orléans. Le commerce au retour n'est pas moins considérable. Une foule d'objets gagnent les quais de Nantes à destination des pays étrangers [2]. Ce transit est une bonne fortune pour les localités qu'il traverse. A Nevers tous ces courants se rencontrent et se croisent, au grand bénéfice des diverses entreprises de transport ainsi que du commerce local. Industriels et marchands expédient dans tous les sens, mais surtout sur Paris et sur Nantes, les divers produits de la terre ou des industries nivernaises. Fers et aciers, faïence et verrerie, bois de chauffage ou bois de travail prennent les routes de terre et s'embarquent sur la Loire, franchissant les ponts de Nevers ou passant sous les arches.

Sources

  • Louis Gueneau, L'organisation du travail à Nevers au 17e et 18e siècle.
  • Publication Praynal (discussion) 22 mai 2021 à 15:02 (CEST)

Notes et références

Notes

  1. Le 7 février 1722, après la peste de Marseille, les membres du Conseil de santé institué à Nevers demandent la suppression des mesures d'ordre, surveillance aux remparts, vérification de toutes les marchandises étrangères, car la contagion n'est plus à craindre. Ces précautions font perdre aux habitants un temps précieux et contrarient l'activité économique. « Un mal plus réel et plus important encore, que le Conseil de Santé croit inévitable, seroit une disette que la garde de notre ville y apporteroit par l'interruption du commerce avec le Berry. Nous n'avons ni magasins ni provisions : nous tirons la plus grande partie de notre subsistance de cette partie du Berry, qui est située au-delà des rivières de Loire et Allier. C'est de là que nous viennent les meilleurs blés, les veaux, les moutons, la volaille, le beurre, les œufs... Si ceux qui ont accoutumé de nous les apporter voyoient les portes de cette ville fermées dans le temps que l'on vit dans leur province avec une sécurité parfaite, ils regarderoient cette ville comme un lieu suspect, avec lequel ils ne voudroient plus avoir de commerce. Les secours que nous tirons de ce costé-là ne pourroient estre remplacés d'ailleurs, la prodigieuse quantité de bois dont cette province est couverte ne fournissant pas suffisamment tout ce qui est nécessaire pour notre subsistance.» (Nevers, BB. 38) A cette époque la vallée de l'Aubois avec La Guerche et Sancoins se rattache au duché de Nivernais. Ces habitudes économiques se sont conservées encore aujourd'hui.

References

  1. Procès-verbal de la généralité de Moulins, dressé en 1686 par l'intendant d'Argouges, publié par Vayssière, et Mémoire de la généralité de Moulins, par l'intendant Le Vayer. 1698, publié par Flament.
  2. cf. Mantellier: Histoire de la Communauté des Marchands de Loire, tome 1, ch. XII